Il y a vingt et un ans de cela, le premier février exactement, une petite famille d'audacieux s'agrandie. Un petit bonhomme allait répondre au nom de Killian. Le premier enfant de ses parents. Ce n'était pas l'enfant qu'on pouvait qualifier de brouillant, rare étaient les fois où il se mettait à hurler, tout en restant dans la logique qu'il n'a que ses petits gazouillis et ses pleurs pour s'exprimer. Il fit ses premiers pas à l'âge de treize mois, les petites bêtises allaient enfin commencer. Déambulant d'abord en chancelant et prenant peu à peu de l'assurance, il n'osait cependant que de rares fois lâcher les mains de papa et maman, c'était bien plus rassurant, si bien que ce n'est que quelques temps plus tard qu'il disparaissait dans le petit appartement familial.
Lorsqu'il eut l'âge de trois ans, le petit bouclé eut la « chance » d'avoir un petit frère. Et comme tous les enfants, il fut enchanté d'avoir quelqu'un avec qui jouer. Mais ses parents le mettaient souvent en garde
« doucement Killian, c'est encore un bébé tu sais » car même sans le vouloir, le petit garçon se montrait un peu trop brute et impatient. Il dut aussi apprendre à partager ses jouets, ce qui n'a vraiment pas été chose facile. On avait beau essayer de lui expliquer que même si ce n'était que prêter tel ou tel jouet, il ne voulait rien savoir. Son jouet, c'était son jouet. Certainement pas celui de Landon. A force de travail, il était capable de laisser ses petites voitures quelques temps, il faut dire que les félicitations de maman étaient mieux.
Les premières années d'école étaient certainement les meilleures, car il ne connaissait pas encore le sens du mot « devoir ». Les premiers copains et copines, les jeux dans la cours de récréation et les punitions de la maîtresse aussi, lorsqu'il n'écoutait pas.. Ce qui était plus souvent qu'on pourrait le croire. C'était un enfant plutôt turbulent jusqu'à l'âge de ses dix ans à peu près. C'est là qu'il a commencé à se lasser de se bagarrer pour un rien. Il faisait toujours le clown en classe de temps en temps, toujours cela dit. Et c'est en allant à la bibliothèque un jour, qu'il se mit à changer. Changer dans tous les sens du terme, il était devenu plus discret, ne parlant que quand il le jugeait vraiment nécessaire. Ses parents venaient à se poser des questions et c'était tout le temps les mêmes qui revenaient aux oreilles du brun
« quelque chose te tracasse ? » ou encore
« on t'embête à l'école ? ». Non. Il passait simplement son temps en lisant quand ses parents ne le surveillaient pas. Ah ça non, ils ne l'auraient pas supporté, pas leur petit fils chéri s'intéresser à autre chose que ce qui se passe chez les audacieux.
Les années passèrent, Killian s'était tourné vers la médecine sans en parler à personne. Passait le plus clair de son temps à s'isoler, là où personne ne saurait le trouver. Il savait très bien qu'il ne resterait pas parmi les audacieux, que sa vocation future l'attendait ailleurs, mais peu de gens s'en rendaient vraiment compte. Ses parents se voilaient la face en criant sur tous les toits que leur fils faisait parti des meilleurs. Ce n'était pas faux, mais ce n'était pas vrai pour autant. Il n'était pas nul, ni le meilleur, il était juste entre les deux. Le test d'aptitude le fit légèrement douter. Divergent. C'était ce qui en était ressorti. Il pouvait faire partie des audacieux comme des fraternels. Il se reprit rapidement et fit ce qu'il avait à faire lors de la cérémonie du choix.
«- Killian Hooper.
- Fraternel. »
Il avait jeté un rapide coup d'œil à ses parents avant de rejoindre sa nouvelle famille. Et le regard rempli de déception de ceux qui l'avaient élevé l'avait hanté longtemps, mais il finit par se faire une raison. A quoi bon faire quelque chose qu'on a pas vraiment envie de faire au final ? Rien du tout. La cérémonie de passage fut une véritable révélation pour lui. Tout était plus facile là-bas. Il n'était pas un grand bavard, mais tout se passer mieux, qu'il ne l'avait imaginé. Il avait même essayé de pousser la chansonnette et plusieurs personnes l'avaient encouragé à continuer de s'entraîner parce qu'il avait du potentiel.
Le jeune homme travaille depuis cinq ans maintenant chez les Fraternels, il s'est parfaitement fait à la vie là-bas. Travaillant dur chaque jour, il faisait partie de ceux qu'on pourrait qualifier d'indispensable en soit, puisqu'il exerce le métier de soigneur depuis son arrivée. Il s'est amélioré en chant. Il ne chante que rarement en public, n'appréciant pas spécialement tous les regards braqués sur sa personne.
Il avait enfin trouvé sa voix.